Rationalité, vérité & démocratie

User de sa raison en philosophie

Conférence donnée au Colloque La reconstruction de la raison. Dialogues avec Jacques Bouveresse (Collège de France, 27-29 mai 2013)

Jean-Jacques Rosat

Comment bien user de sa raison en philosophie ? J’ai cherché des réponses à cette question dans les livres de Bouveresse. De mes lectures, j’ai tiré des leçons. En voici huit pour aujourd’hui. Je ne pourrai donner ici que les linéaments de chacune d’entre elles.

Tous les textes que je citerai sont de Bouveresse, ou sont des textes qu’il cite. Le découpage de ces citations, leur agencement, le commentaire que j’en donne et les enseignements que je crois pouvoir en tirer sont exclusivement les miens et ne sauraient lui être imputés.

Première leçon : des dictateurs

Dans « La science sourit dans sa barbe », son premier essai sur Musil, publié en 1978, Bouveresse écrit : « L’exercice de la philosophie requiert un tempérament dictatorial et guerrier, dont Ulrich est foncièrement dépourvu : « Les philosophes sont des violents qui, faute d’avoir une armée à leur disposition, se soumettent le monde de la manière qui consiste à l’enfermer dans un système. » L’entreprise philosophique tend naturellement à la constitution d’une vision du monde achevée et définitive, qui représente l’équivalent de la tyrannie politique dans l’ordre de l’esprit. « Une victoire spirituelle, remarque Musil, est à proprement parler plus effroyable qu’une victoire guerrière. » Un philosophe conséquent, c’est-à-dire qui n’accepte pas seulement la guerre, mais également le risque de la gagner, appartient toujours, réellement ou potentiellement, à la race des dictateurs spirituels, dont le règne a précédé, selon Musil, celui des dictateurs politiques. […] Aux protestations indignées des philosophes professionnels, Musil aurait répondu que c’est toujours ce qui peut subsister d’indécision, d’inachèvement et d’ouverture dans une doctrine philosophique qui est considéré comme le moins philosophique en elle. De ce point de vue, l’art, tel qu’il le conçoit, s’oppose directement aux « activités idéologiques » comme la religion et la philosophie[1]. »

Supposons que quelqu’un partage le jugement de Musil et en trouve, dans le monde philosophique où il vit, toutes les confirmations possibles, mais qu’il ne se sente personnellement aucun goût pour l’exercice de la dictature et en rejette même absolument l’idée pour des raisons intellectuelles, morales et politiques. Pourtant, à la différence d’Ulrich et de Musil, il n’opte ni pour une science ni pour la littérature mais obstinément pour la philosophie. Que fera-t-il ? Peut-il être un philosophe conséquent ? Est-il possible dans l’univers dictatorial et guerrier de la philosophie de survivre et de combattre en s’interdisant les armes de la domination sur les esprits ? De faire reconnaître que l’indécision, l’inachèvement et l’ouverture ne sont pas des faiblesses mais les qualités et les exigences le mieux accordées à l’état des problèmes philosophiques, et sans doute même à leur nature ?

On voudrait se rassurer en se disant que, sitôt qu’elle s’appuie sur la seule raison, la philosophie cesse d’être une « activité idéologique ». Mais, de Platon à Hegel, les dictatures philosophiques au nom de la raison n’ont pas manqué. Et surtout la philosophie n’est pas une science ; tout à la fois productrice d’idées et critique d’idées, elle ne saurait s’immuniser contre l’idéologie comme contre un corps étranger ; elle exige du philosophe qu’il assume ce qu’il y a d’irréductiblement « idéologique » en elle.

Deuxième leçon : de la désorientation

Les problèmes philosophiques naissent d’une expérience de désorientation dans nos concepts. Dans « Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? », une conférence prononcée dans les premiers jours de l’an 2000, Bouveresse reprend à son compte cette idée de Wittgenstein. « L’expérience philosophique par excellence est celle de l’homme qui, à un moment donné, dit : “Je ne sais plus où j’en suis” ou “J’ai perdu mon chemin ”. C’est, en l’occurrence, le chemin qui permettrait de s’orienter dans son propre langage qui a été perdu[2]. »

En philosophie, l’incertitude est radicale, principielle et permanente. « Ce qui est caractéristique de la philosophie est qu’à la différence de ce qui se passe ailleurs, et notamment dans les sciences, l’incertitude descend, dans n’importe quelle question philosophique, jusqu’à la racine et, pourrait-on ajouter, rien ne permet d’être certain qu’elle pourra être surmontée[3]. »

Il n’y a pas, en philosophie, de principe initial solide et assuré, pas de point d’Archimède. Et on peut douter que les problèmes philosophiques aient une solution unique : il n’y a aucun consensus en philosophie, et aucune raison de croire qu’il puisse – ni même qu’il doive – y en avoir un. « La philosophie n’est pas le lieu d’un consensus quelconque, ne serait-ce que sur les principes les plus fondamentaux, mais, au contraire, celui du désaccord et du conflit non résolu et probablement irrésoluble entre des options et des réponses qui sont incompatibles[4]. »

Il n’y a, en philosophie, ni commencement ni conclusion ; au point de départ, on est déjà in medias res ; à l’arrivée, on se retrouve ailleurs, mais jamais à bon port ; donc in medias res encore. Tous les essais de Bouveresse reconnaissent cette situation et sont écrits ainsi.

La possibilité d’indécidabilité des problèmes philosophiques n’est pas en elle-même un argument contre leur réalité ; elle ne le deviendrait – soutient Bouveresse dans La demande philosophique – que si l’on supposait en outre « qu’il n’y a de question réelle que là où il existe une possibilité de principe ou, mieux encore, une possibilité pratique de réponse ». Mais, poursuit-il, « Valéry fait remarquer […] que c’est peut-être précisément là où l’excédent des questions que l’on peut formuler sur les réponses que l’on peut espérer obtenir est le plus manifeste que l’intelligence, la créativité et l’ingéniosité humaines ont trouvé le mieux à s’exercer et se sont révélées les plus productives. Et – ajoute Bouveresse – on pourrait même se demander si cet excédent ne définit pas, justement, l’espace de la culture proprement dite, considérée comme une tentative de réponse aux questions qui, à strictement parler, n’ont pas de réponse »[5].

L’expérience de désorientation qui est à la source de l’activité philosophique incite soit à chercher recours auprès des maîtres et des guides, en offrant alors prise aux dictateurs (c’est de cette désorientation qu’ils tirent leur pouvoir), soit à adopter une doctrine ou une théorie bien établie, pour ne s’engager que sur un chemin qu’on croit assuré parce qu’il est déjà balisé. Mais la philosophie, en tant que telle, n’a pas de chemin à offrir à celui qui est désorienté dans ses concepts : comme Bouveresse le souligne dans « Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? », elle n’a pas de pouvoirs intellectuels qui lui seraient propres. « Il n’y a pas de raison de croire que ce qui fait du philosophe un philosophe est le fait de disposer par essence d’une capacité supérieure à s’orienter et à orienter les autres. Le philosophe – et il faut comprendre ici, selon l’expression de Wittgenstein, « le philosophe qui est en chacun de nous » – n’est pas mieux orienté, mais plutôt, au contraire, plus désorienté que le non philosophe[6]. »

Le philosophe n’a pas de sens de l’orientation spécifique ni d’autres moyens que tout un chacun.

Troisième leçon : des raisons justificatives

À la question « comment s’orienter dans la pensée ? », il n’y a pas d’autre réponse que celle des Lumières : « oser se servir de sa raison ». Cette maxime marque que la philosophie est une activité irréductiblement personnelle. C’est moi qui me sers de ma raison. Aucune puissance – intellectuelle, politique, religieuse ou morale – ni personne d’autre ne peut le faire à ma place.

Mais que faut-il entendre par « ma raison » ? La raison une et universelle qui est en moi comme en chaque être humain ? Cette réponse du rationalisme classique n’est guère recevable. Sur ce point, Bouveresse partage la position de Putnam dans Raison, vérité et histoire : « Je ne crois pas – écrit celui-ci – […] que la rationalité soit définie par un ensemble de “canons” ou de “principes invariables. […] Je suis d’accord avec les philosophes subjectivistes pour dire qu’il n’y a pas d’organon anhistorique qui définit ce que c’est qu’être rationnel[7]. »

Les exigences classiques d’universalité et d’objectivité n’en sont pas pour autant affaiblies. « Ma raison », certes, ce n’est rien d’autre que ma capacité à étayer mes croyances et mes actions sur des raisons. Mais celles-ci sont à entendre au sens fort, frégéen, de raisons justificatives, et pas seulement explicatives : de raisons non réductibles à des causes psychologiques, sociologiques et historiques. Le noyau du rationalisme est là.

L’idée est clairement affirmée dans Le philosophe chez les autophages. « La distinction entre les causes psychologiques, psychanalytiques et autres de la croyance et de l’action et les raisons objectives qui les justifient est le postulat de base sur lequel repose toute espèce de rationalisme[8]. »

Elle est développée dans « La “causalité des raisons ». « Toutes les raisons explicatives (au nombre desquelles il faut faire figurer les causes diverses auxquelles on peut imputer la forme d’une croyance) ne sont pas des raisons justificatives (autrement dit, des raisons au sens propre de la croyance). […] Bien qu’elles n’agissent qu’en devenant à un moment donné des raisons pour quelqu’un, les raisons sont en elles-mêmes impersonnelles et indépendantes des circonstances, du lieu et du moment. À la différence des causes, elles ont une relation interne à la vérité et peuvent justifier la croyance parce qu’elles garantissent la vérité de la proposition qui est crue ou, en tout cas, augmentent sérieusement ses chances d’être vraie[9]. »

Qu’en est-il alors des raisons en philosophie ? Il y a à ce sujet chez Bouveresse deux lignes directrices, divergentes sans être incompatibles, et qui correspondent à deux manières de traiter les problèmes, qu’il combine souvent sans cependant les mêler.

La première orientation peut être dite, pour simplifier, « frégéenne » ; elle découle de la relation interne entre raisons et vérité qui vient d’être rappelée : puisque depuis 2 500 ans les philosophes avancent des affirmations ou nient celles des autres en émettant des objections, il s’agit sur chaque problème d’examiner les affirmations en présence et de se demander quelles raisons on peut avoir de les juger vraies ou fausses. Dans La demande philosophique, Bouveresse déclare très explicitement qu’il opte en philosophie pour une conception « moléculariste » des propositions (contre la conception holiste) et pour une notion de vérité qui « ne peut pas être fondamentalement différente de la notion usuelle et doit être plus du type vérité-correspondance » que du type vérité-cohérence[10]. « “Qui peut citer, s’est demandé Badiou, un seul énoncé philosophique dont il y ait un sens à dire qu’il est ‘vrai’ ?” Mais celui qui a lu Frege dira que, si p est une proposition de forme assertorique et s’il y a un sens à dire que p, il y a certainement un sens à dire qu’il est vrai que p ou que p est vrai, puisque la pensée qu’il est vrai, par exemple, que les nombres sont des objets non sensibles, ne contient rien de plus et rien de moins que la pensée que les nombres sont des objets non sensibles[11]. »

La seconde orientation peut être dite, elle, « wittgensteinienne » : étant donné la nature des problèmes qu’on y rencontre, les raisons en philosophie ne peuvent être démonstratives ; elles ont toujours un caractère aspectuel. L’idée est clairement exprimée dès La rime et la raison. « La manière dont on peut convaincre quelqu’un de quelque chose en philosophie ressemble beaucoup à la manière dont on peut amener quelqu’un à une certaine position sur un problème éthique ou esthétique, et bien peu à ce que l’on appelle d’ordinaire une démonstration ou une preuve. […] Un mathématicien ne fait pas de la « propagande » pour ses théorèmes, mais un philosophe fait toujours, en un certain sens, de la propagande pour ses idées et ses théories[12]. » Autrement dit, « il est essentiel que les raisons puissent persuader et également ne pas persuader[13]. »

La tension entre ces deux manières d’utiliser sa raison en philosophie n’est pas sans rapport avec la position instable et singulière de celle-ci entre science et art – une position que La demande philosophique assume clairement. « On ne peut pas considérer autrement que comme des échecs caractérisés toutes les tentatives qui ont été faite jusqu’ici pour faire tomber définitivement la philosophie soit du côté de la science, soit du côté de la création littéraire et de l’art[14]. »

Quatrième leçon : de la critique

À la différence des causes, dont la recherche enclenche une régression potentiellement infinie, les justifications ont une fin ; toute recherche de raisons justificatives bute rapidement sur le socle de l’injustifié. On lit dans La rime et la raison : « Nous ne pourrions jamais donner de raisons s’il n’y avait des raisons que nous utilisons sans en demander raison, qui sont bonnes en elles-mêmes, et non pas pour d’autres raisons, qui justifient sans avoir à être justifiées (des concepts, des règles, des étalons, des critères, des « conventions », etc.). Nous ne pouvons répondre à la question “Pourquoi croyons-nous ou disons-nous ou faisons-nous cela ?” dans certains cas que pour autant que nous n’y répondons pas, qu’elle n’a pas de sens, dans d’autres cas. […] Il y a toujours en fait quelque chose qui doit être accepté d’abord si l’on veut pouvoir simplement chercher des raisons : un langage, une culture, une « forme de vie », et cela, même si l’on cherche des raisons pour imposer précisément un changement de langage, de culture, de forme de vie[15]. »

Toute recherche d’un lieu, d’un principe ou d’un point de vue sublime à partir duquel la raison ou la philosophie voudrait s’auto-justifier, puis englober le réel (nature, société, histoire), que ce soit pour le justifier ou pour le critiquer, est illusoire. La prétention au point de vue critique absolu – si prégnante dans la philosophie contemporaine quand elle se veut postkantienne, postmarxiste ou post-nietzschéenne, et dans toutes les pensées qui se regroupent aujourd’hui sous l’étiquette « théorie critique » – n’est pas moins trompeuse ni dangereuse que la prétention plus classique (phénoménologique ou onto-théologique) au fondement. Cette idée est centrale dans Le philosophe chez les autophages. « Ce n’est pas seulement lorsqu’elles sont orientées vers le « fondement » et la « légitimation », mais également lorsqu’elles sont censées représenter une critique radicale, une démystification ou une condamnation, que nos tentatives d’explication et de rationalisation se révèlent la plupart du temps insatisfaisantes et erronées[16]. »

Si elle tente de s’auto-légitimer, la raison critique tend inévitablement et simultanément à la totalisation, d’une part, et à l’autodestruction, de l’autre. Certes, cela n’avait pas échappé aux auteurs de la Dialectique de l’Aufklärung, qui écrivent : « Non seulement la tendance idéelle, mais également la tendance pratique à l’auto-annihilation appartient à la rationalité depuis le début, et pas du tout uniquement dans la phase dans laquelle la tendance en question se manifeste sans aucun voile[17]. »

« Cette situation s’explique aisément – commente Bouveresse – si l’on considère que la raison, en tant qu’instance essentiellement critique, ne peut remplir efficacement la fonction de légitimation qui est normalement dévolue au mythe et ne saurait, en dernière analyse, reculer devant la mise en question radicale de sa propre légitimité[18]. » Malgré sa lucidité suraiguë et sa virtuosité vertigineuse dans le maniement de la critique et de l’autocritique, Adorno s’est enferré dans cette impasse.

Par contraste – je continue de lire Le philosophe chez les autophages, sur lequel je vais m’appuyer jusqu’à la fin de cette quatrième leçon – : « La force de la critique de Wittgenstein provient en grande partie du fait qu’elle renonce délibérément à toutes les prétentions universalisantes et totalisantes qui ont pour effet de dépouiller la critique elle-même de toute espèce de légitimité, de point d’appui et, finalement, de signification. Et elle ne revendique aucune position privilégiée et protégée à partir de laquelle la clarté philosophique pourrait être répandue sur la confusion ambiante[19]. »

Comme l’explique judicieusement Cavell, que Bouveresse cite une page plus loin : « L’originalité de Wittgenstein réside dans le fait qu’il a développé des modes de critique qui ne sont pas moralistes, c’est-à-dire qui ne permettent pas au critique de s’imaginer qu’il est lui-même exempt des fautes qu’il voit autour de lui, et qui opèrent non pas en essayant d’établir la fausseté ou l’erreur d’un énoncé donné, mais en montrant que la personne qui formule une assertion ne sait pas réellement ce qu’elle veut dire, n’a pas réellement dit ce qu’elle voulait[20]. »

Les modes critiques qui échappent à la sublimation, à la totalisation, à l’autodestruction et à l’autophagie sont ceux de la satire. « La contestation qui utilise essentiellement les armes de la satire et de la dérision jouit d’un avantage incontestable par rapport à la critique « sérieuse », parce qu’elle opère au premier degré, en ignorant la préoccupation réflexive de l’auto-légitimation et également le souci de la crédibilité et de l’efficacité[21]. »

Les usages de la raison qui offrent le moins de prise à la complaisance et à l’automystification philosophique, ce n’est pas chez des rationalistes déclarés que Bouveresse les trouve – pas même chez Russell ou chez les Viennois –, c’est chez Wittgenstein. « La critique de la philosophie, de la culture et de la société que l’on trouve dans les textes de Wittgenstein est manifestement du type satirique ou ironique plutôt que théorique et constructif. Elle n’est pas tourmentée par la question de sa propre légitimité, parce qu’elle s’appuie, en dernière analyse, sur une réaction d’hostilité et d’incompréhension plus ou moins instinctive, qu’elle s’efforce de clarifier, et non à proprement parler de justifier, à l’égard de la civilisation actuelle, de ses modes de pensée et d’expression et de ses objectifs réels ou supposés. Elle fait appel, chez le lecteur, à quelque chose de beaucoup plus élémentaire et plus puissant qu’une conviction théorique, à savoir une capacité de résistance et de rébellion qu’elle n’est pas en mesure de créer de toute pièces et sans laquelle elle ne peut avoir aucun effet réel[22]. »

Cinquième leçon : du tempérament

Cette dernière remarque permet de mieux délimiter la place et le rôle de la raison. Assurément, elle seule fournit des justifications et le moyen de trier entre les affirmations, donc d’écarter celles qui ne sont pas ou sont insuffisamment justifiées. Mais, de même que, dans l’examen des thèses et des opinions, on doit finir par s’appuyer sur « des raisons qui justifient sans avoir à être justifiées », de même ce n’est pas la raison elle-même qui peut fournir à l’activité du philosophe son impulsion et son orientation premières. Cette antériorité, voire cette priorité de l’instinct et de la volonté sur les raisons est ouvertement assumée par Bouveresse : elle est pour lui si caractéristique d’un rationalisme conséquent qu’il la place, dans Le philosophe et le réel, sous l’égide de Leibniz. « Défendre la raison et l’intellect n’est pas être intellectualiste. Et ce n’est pas seulement chez moi, je crois, que les acceptations et les refus ont presque toujours initialement quelque chose de quasi-instinctif. […] Même les plus grands rationalistes, y compris Leibniz, ont admis le plus souvent que les raisons viennent généralement après[23]. »

La capacité de résistance aux diverses formes de domination intellectuelle et d’emprise spirituelle qui règnent en philosophie et, plus largement, la capacité libératrice de s’écarter des enchainements d’idées admis et de refuser les dilemmes imposés exigent d’abord un certain tempérament intellectuel : « Je ne dirais pas que la philosophie est une affaire de tempérament. Mais […] il faut avoir un tempérament intellectuel d’une certaine sorte pour être capable, dans diverses circonstances, de résister aux convictions obligatoires. Des raisons purement intellectuelles ne suffiraient pas[24]. »

La raison que donne ici Bouveresse mérite l’attention. « Car – poursuit-il – des raisons intellectuelles, pour autant qu’elles soient disponibles, pourraient agir aussi bien sur d’autres. Mais, qu’une personne plutôt qu’une autre soit capable d’opposer un refus quand presque tout le monde dit « oui », cela dépend d’autre chose qui est difficile à définir, mais qui relève certainement plus de l’instinct et de la volonté que du raisonnement[25]. »

Ce n’est pas simplement l’idée kantienne qu’outre la raison il faut le courage de s’en servir. C’est l’idée que, de même que, pour qu’un minimum de justice existe, il faut que soient enracinés dans des individus le sentiment du caractère insupportable des injustices et la détermination à y mettre un terme, quel que soit le prix à payer pour cela, de même, pour qu’un minimum de raison existe en philosophie, il faut que soient enracinés dans des individus le sentiment du caractère injustifiable de certaines croyances ou de certaines idées, et la détermination à ne pas se laisser raconter d’histoires ni à s’en inventer, quel soit le prix à payer en insatisfaction intellectuelle, inconfort psychologique ou désillusion existentielle.

C’est cela le tempérament. Et celui-ci est plus décisif que les connaissances dans l’exercice de la philosophie : la vérité ou l’erreur en dépendent pour une large part. Comme le dit David Stove, un autre rationaliste satiriste, qu’approuve ici Bouveresse : « Les défauts de connaissance empirique ont moins à voir avec les façons dont nous nous trompons en philosophie que les défauts de caractère : des choses comme la simple incapacité de se taire, la volonté d’être considéré comme profond, la soif de pouvoir, la peur, en particulier la peur d’un univers indifférent. Ces choses-là font partie des sources émotionnelles évidentes de la mauvaise philosophie[26]. »

Mais ce n’est seulement que des failles psychologiques et morales sont à la source d’erreurs philosophiques. C’est que, plus radicalement, le renoncement qu’implique la clarification des problèmes philosophiques étant un renoncement à ce qu’on voudrait voir, la clairvoyance en philosophie est d’abord et avant tout, comme Wittgenstein ne cesse de le dire, une affaire de volonté. « [Pour lui] – écrit Bouveresse–, la difficulté [en philosophie] ne tient pas du tout à la nécessité d’acquérir une information ou une compétence spéciales sur des questions particulièrement ésotériques, mais à un conflit qui existe entre ce que l’on a sous les yeux et ce que l’on voudrait voir. [Suit une citation tirée des Remarques mêlées :] “Ce qui rend l’objet difficilement intelligible est – lorsqu’il est significatif, important – non pas qu’une quelconque instruction particulière sur des choses abstruses serait nécessaire à sa compréhension, mais l’opposition entre la compréhension de l’objet et ce que la plupart des hommes veulent voir. De ce fait, ce qui est le plus immédiatement saisissable peut justement devenir plus difficilement compréhensible que n’importe quoi d’autre. Ce n’est pas une difficulté de l’intellect, mais de la volonté qui doit être surmontée[27].” »

Sur la place de la connaissance dans la philosophie et, plus généralement, sur les relations entre connaissance et liberté, il faudrait pouvoir ici s’arrêter : parler de l’insistance de Bouveresse sur le fait que le savoir n’est pas intrinsèquement libérateur et de son désaccord avec Bourdieu à ce sujet, du « dualisme critique » de Popper, qu’il revendique dans La demande philosophique, mais aussi, bien sûr de ce que Mulligan a appelé « le postulat de Musil », des applications que Bouveresse en a faites, et de la critique qu’il adresse à Wittgenstein sur ce point, etc.

Ce qui m’importe avant tout ici, c’est l’idée que, l’activité philosophique étant d’abord un travail sur soi et sur ses conceptions, l’usage de la raison en philosophie implique un degré de volontarisme et une solitude intellectuelle et morale qu’on ne rencontre pas dans les sciences. C’est à nouveau sur Le philosophe chez les autophages que je m’appuie ici. « À la différence de ce qui se passe dans la recherche scientifique, où l’individu peut profiter des acquis antérieurs sans être obligé de fournir à nouveau les mêmes efforts que ses prédécesseurs, la cure philosophique ne peut être qu’une chose strictement personnelle[28]. […] Wittgenstein constate que “le philosophe n’est pas le citoyen d’une communauté de pensée, [et que] c’est justement ce qui fait de lui un philosophe”[29]. S’il y avait une communauté philosophique, elle ne pourrait être une communauté de savoir, mais seulement une communauté de vouloir, dont les membres ont à la fois les mêmes tentations intellectuelles et la même volonté de les combattre[30]. »

Quoi qu’il ait du respect pour les membres des unions rationalistes, Bouveresse n’a jamais imaginé d’adhérer à aucune d’elles. Les exigences de logique et de rationalité dans le domaine de la pensée ont même à ses yeux quelque chose d’asocial, voire d’antisocial, comme il le souligne dans le commentaire d’un passage des Hauteurs béantes d’Alexandre Zinoviev. « L’exigence de logique, de rationalité et de transparence, qui coïncide en profondeur avec l’exigence de moralité elle-même, ne peut être que le fait d’une minorité insignifiante de dissidents et d’asociaux ; et c’est la volonté d’introduire une exigence de ce genre dans l’analyse et la compréhension des mécanismes sociaux et politiques qui transforme l’intellectuel en individu dangereux pour la collectivité. C’est justement au rationalisme (et même, s’il est permis d’utiliser un terme aussi injurieux) au positivisme implacable de sa méthode (je veux dire à sa façon très remarquable de considérer qu’un simple exposé des faits peut constituer la meilleure théorie) que la description de Zinoviev doit son efficacité critique et sa puissance satirique incomparables[31]. »

Sixième leçon : du pouvoir et des mots

Ne pas se raconter d’histoire en philosophie, c’est d’abord ne pas s’en laisser conter par les mots ou, plus exactement, par les croyances qui attribuent aux mots de la philosophie des pouvoirs qu’ils n’ont pas et ne sauraient avoir. Le nœud de la difficulté est clairement posé par Valéry, l’antiphilosophe. « La raison pour laquelle la philosophie est, selon lui, irrémédiablement condamnée à l’illusion et à l’impuissance consiste dans le fait que la philosophie dépend entièrement du langage, plus précisément du langage ordinaire, une dépendance dont les sciences ont réussi, au contraire, à s’affranchir au maximum, et qu’elle est en même temps, à la différence de la poésie, constitutivement empêchée de reconnaître, et éventuellement d’utiliser de façon positive, cette dépendance[32]. »

Mais qu’advient-il si un philosophe qui reconnaît pleinement cette dépendance ne désespère pas, pour autant, de l’utiliser de façon positive ? Il lui faut maintenir en lui et aiguiser en permanence une capacité à se déprendre des illusions constitutivement engendrées par la philosophie, autrement dit : cultiver une certaine forme d’antiphilosophie. « Notre philosophie [en effet] n’est pas – en tout cas, pas naturellement –, comme elle le voudrait, l’expression de la distance et de la conscience critiques, mais bel et bien celle d’un « envoûtement » par les formes de notre langage[33]. »

User de sa raison en philosophie, c’est, notamment, avec Valéry, refuser de croire que « les mots … savent plus que nous ! – contiennent plus que nous – et même plus que l’homo »[34]. C’est reconnaître également, avec Rorty, que « les concepts ne font rien par eux-mêmes, qu’ils sont essentiellement des instruments dont nous nous servons et que c’est toujours nous qui faisons des choses avec les concepts »[35]. C’est – plus difficile sans doute – rompre avec « l’idée que [comme dit Valéry] l’on peut, sans avoir à exploiter autre chose que les ressources du langage, parvenir à une connaissance de la nature réelle et intime des choses »[36] – croyance étroitement liée à tout ce qui se présente comme un besoin métaphysique. Bien entendu, les philosophes qui affichent ces croyances n’ont pas, en réalité, les pouvoirs auxquels ils prétendent : « Les philosophes présument peut-être beaucoup de leurs forces quand ils se croient en mesure de décréter en quelque sorte, à un certain stade de l’évolution historique, telle qu’ils la comprennent, la disparition de notions qui, considérées du point de vue ordinaire, pré-théorique et pré-philosophique, continuent à apparaître absolument indispensables et fondamentales et n’ont probablement pas besoin de l’approbation des philosophes pour le rester[37]. »

Mais ces notions ordinaires ont besoin d’être défendues car, certes, les philosophes n’ont pas sur elles les pouvoirs qu’ils croient ; mais, à partir du moment où ils parviennent à faire que les gens croient au pouvoir de leurs mots ou à leur pouvoir sur les mots, ils acquièrent sur les esprits des pouvoirs bien réels. « Le philosophe spéculatif ne se borne pas à produire des excitations intellectuelles, de l’ivresse conceptuelle, de l’illusion et de la confusion. [Comme dit Valéry :] « Il voudrait bien, le sorcier, déplacer une masse, élever la température d’un corps – sans agir qu’au-dedans de soi. Mais il a dû se borner à mouvoir des hommes, des passions, des images[38]. »

Septième leçon : de l’essayisme

Dans La demande philosophique, Bouveresse écrit : « Il faut se représenter ce qu’était la philosophie française au début des années soixante pour se rendre compte à quel point la façon qu’avait Vuillemin de démontrer, par la théorie et par l’exemple, qu’il était possible de traiter les choses inexactes dont s’occupe la philosophie avec un degré d’exactitude et de précision bien supérieur à celui dont on se contente généralement était une chose nouvelle et a été déterminante pour certains d’entre nous[39]. »

On ne peut manquer d’être frappé par la similitude entre cette caractérisation de l’attitude philosophique à son meilleur et celle du genre de l’essai, telle que Bouveresse la tire de Musil. « Ce que cherche [l’essai] et que dans ses moments heureux il trouve [, c’est] la formule qui réussit à combiner de façon appropriée l’exactitude maximale que le sujet est en mesure de supporter avec l’inexactitude qu’il conserve aussi nécessairement, la précision analytique avec la passion qui ne cherche pas à connaître, mais à créer et à transformer[40]. »

C’est la raison pour laquelle, entre les différents genres utilisés par Bouveresse dans son œuvre, celui qui est le plus approprié à son style de pensée est, à mon avis, l’essai. Nombre de ses articles et conférences sont, en réalité, des essais ; nombre de ses livres, si l’on y regarde bien, sont des essais qui ont pris du volume ou des agencements complexes de plusieurs essais ; et, même quand il pratique un autre genre – cours, étude ou encore satire –, l’essai souvent n’est pas loin.

À l’essayisme comme attitude philosophique, on peut opposer deux objections. La première est qu’un philosophe essayiste serait nécessairement un philosophe littéraire, c’est-à-dire relâché, sans exactitude et, par conséquent, étranger, voire hostile à la raison. Cette objection ne tient pas. « Musil propose de définir l’essai comme consistant non pas à laisser tomber certaines exigences et à s’octroyer un certain relâchement dans un domaine où l’on peut travailler exactement, mais plutôt à « parvenir à la plus grande rigueur que l’on peut atteindre dans un domaine où l’on ne peut justement pas travailler exactement ». Il ne s’agit donc pas d’être moins exact dans un domaine où l’on pourrait en principe l’être davantage, mais de l’être beaucoup plus dans un domaine où on ne peut pas l’être tout à fait[41]. »

Le point crucial est de savoir quel genre d’exactitude est adéquat en philosophie, et quel genre est inapproprié. Musil oppose, à ce propos, l’exactitude pédante à l’exactitude imaginaire ou fantastique (phantastich) – une opposition que Bouveresse résume ainsi : « L’exactitude pédante, que l’on pourrait appeler aussi “scolastique” prend son désir de précision pour la réalité et se réfugie dans des concepts qui permettent de traiter le vague comme s’il était malgré tout précis, alors que l’exactitude fantastique s’efforce d’en reconnaître simplement l’imprécision[42]. […] L’“exactitude fantastique” n’est rien d’autre que l’exactitude de l’imagination elle-même, celle dont elle fait preuve quand elle décide de s’en tenir aux faits, par opposition à l’exactitude pédante, “qui s’en tient à des constructions (figées) de l’imagination, à des idées”[43]. »

La seconde objection me paraît beaucoup plus forte : alors que l’exigence de vérité est inséparable de la philosophie, l’essai musilien a affaire plutôt aux questions de significations. « L’essai, pour Musil, semble avoir affaire, beaucoup plus qu’à la question de la vérité ou de la fausseté proprement dites, à celle de la signification et du changement de signification que subissent les choses, les actions et les hommes lorsqu’on modifie l’ensemble auquel ils sont intégrés. Le principe de l’essai est donc un principe de variation[44]. […] Ce qui est déterminant dans l’idée de l’“essai” […, c’est l’idée] du changement d’aspect, de la pluralité et de la variabilité essentielle des points de vue possibles, et le perspectivisme et le contextualisme qui en découlent[45]. »

Et l’essai ainsi défini admet la contradiction. « “On peut contredire quelqu’un sans le rabaisser – écrit Musil –, et […] – surtout dans le domaine de l’essayisme au sens le plus large ! – plusieurs opinions doivent être valables en même temps. […]” Cette situation est évidemment à mettre en rapport avec le fait que déjà à l’intérieur de l’essai lui-même les pensées peuvent se contredire sans pour autant s’exclure et ne sont pas supposées, comme ce serait le cas dans une production scientifique, s’additionner en une vérité[46]. »

L’essai philosophique ne pourrait assurément ni abandonner l’exigence de la vérité ni endosser simultanément des opinions contradictoires sans cesser d’être philosophique ou n’être plus que de la mauvaise philosophie. Mais il n’y a là rien qui doive conduire à renoncer à l’essayisme en philosophie ou à considérer que celui-ci trahirait le rationalisme. Pour deux raisons notamment.

Premièrement, si, comme on l’a dit ici dans la troisième leçon, « la manière dont on peut convaincre quelqu’un de quelque chose en philosophie ressemble beaucoup à la manière dont on peut amener quelqu’un à une certaine position sur un problème éthique ou esthétique, et bien peu à ce que l’on appelle d’ordinaire une démonstration ou une preuve », l’essai au sens musilien est un genre approprié à la philosophie.

Deuxièmement, un problème philosophique se présente souvent sous la forme suivante : nous avons de bonnes raisons de vouloir dire p, nous avons de bonnes raisons de vouloir dire non-p, et la meilleure chose que nous ayons à faire est d’essayer de parcourir le réseau labyrinthique de toutes ces raisons pour essayer d’y voir plus clair. Dans un tel cas, non seulement nous ne sommes pas tenus de trancher, mais ce serait le plus souvent prendre une décision irrationnelle et arbitraire car elle impliquerait d’étouffer ou d’écraser des raisons qui, dans la situation de problème en question, se présentent à nous comme des raisons objectives. La bêtise serait de conclure.

Ce qui me conduit à la huitième et, pour aujourd’hui, dernière leçon.

Huitième leçon : de l’inachèvement et du silence

Une autre tendance inhérente à la philosophie est favorable aux dictateurs : la volonté de totalisation. « “Le philosophe, écrit Musil, a un besoin plus fort [que le romancier ou le dramaturge] de faire de ses pensées une manie […], une intégralité. Ce n’est pas un degré plus élevé d’intellectualité vraie, mais une autre attitude psychique[47].” C’est précisément cette relation monomaniaque et cette volonté de totalisation qui empêchent le philosophe de mettre réellement ses idées à l’épreuve en acceptant de les faire opérer concrètement dans un certain contexte, réel ou fictionnel, et donc nécessairement de les relativiser[48].

Combattre cette attitude psychique monomaniaque exige, comme on l’a vu dans la première leçon, de reconnaître et de faire reconnaître que l’indécision, l’inachèvement et l’ouverture non seulement ne sont pas des faiblesses, mais devraient être des vertus philosophiques cardinales. Le modèle est ici l’attitude scientifique telle qu’elle est caractérisée notamment par Mach, qui écrit et que Bouveresse cite : « La suprême philosophie du chercheur dans les sciences de la nature consiste précisément à supporter une vision du monde inachevée et à la préférer à une vision du monde close, mais insuffisante ». Bouveresse commente : « L’exemplarité de la science […] réside avant tout dans le fait qu’elle a appris à se concevoir et à s’accepter comme une solution indéfiniment partielle, ce que la philosophie n’est généralement pas parvenue à faire et est peut-être par nature incapable de faire[49]. »

L’inachèvement est supportable pour le scientifique parce qu’il sait que ses résultats seront repris par d’autres, fût-ce pour être critiqués et dépassés. Il est difficilement supportable pour le philosophe parce que le reconnaître, c’est accepter de se taire. « Comme le dit Wittgenstein, la difficulté principale en philosophie est de ne pas en dire plus que l’on n’en sait (et, bien entendu, a fortiori, de ne pas en dire plus que l’on ne croit)[50]. “Dans l’art, écrit [encore] Wittgenstein, il est difficile de dire quelque chose qui soit aussi bon que : ne rien dire[51].” »

Bouveresse poursuit : « C’est évidemment encore bien plus vrai de la métaphysique et de la morale. C’est pourquoi je dirais volontiers comme Sterne, et de façon tout à fait sérieuse : “Je regarde […] avec respect un chapitre dans lequel il n’y a que rien, considérant qu’il y en a de plus mauvais dans le monde.[52] ” »

Ce n’est pas une boutade. Si, comme l’écrit Bouveresse dans « Les positivistes », « la philosophie est – ou devrait être –, pour une part essentielle, l’art de traiter correctement ce qu’on ignore[53] », user de sa raison en philosophie implique de prendre cette maxime de Sterne tout à fait au sérieux et de la mettre en pratique.


Cette conférence a été initialement publiée dans Claudine Tiercelin, La Reconstruction de la raison. Dialogues avec Jacques Bouveresse, éditions du Collège de France, Collection Philosophie de la connaissance, mars 2014

https://books.openedition.org/cdf/3570 


 

[1]« La science sourit dans sa barbe » [1978], La voix de l’âme et les chemins de l’esprit, Le Seuil, 2001, p. 90

[2]« Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? » [2000], Essais IV, Agone, 2004, p. 2.

[3]Ibid., p. 3

[4]Ibid., p. 6.

[5]La demande philosophique, L’Éclat, 1996, p. 110

[6]« Qu’est-ce que s’orienter dans la pensée ? », op. cit., p. 2.

[7]Le philosophe chez les autophages, Minuit, 1984, p. 59.

[8]Ibid., p. 98.

[9]« La “causalité” des raisons » [1991], Essais III, Agone, 2003, p. 160.

[10]La demande philosophique, op. cit., p. 103.

[11]Ibid., p. 107.

[12]La rime et la raison, Minuit, 1973, p. 187.

[13]Ibid., p. 237.

[14]La demande philosophique, op. cit., p. 48.

[15]La rime et la raison, op. cit., p. 188-189.

[16]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 151.

[17]Horkheimer & Adorno, Dialektik der Aufklärung, p. 6 (cité dans Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 125.

[18]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 125-126.

[19]Ibid., p. 150-151.

[20]Stanley Cavell, The Claim of Reason, Oxford UP, 1979, p. 175-176 (cité dans Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 152-153.

[21]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 156-157.

[22]Ibid., p. 157.

[23]Le philosophe et le réel, Hachette, 1998, p. 20.

[24]Ibid., p. 21.

[25]Ibid.

[26]David Stove, The Platon Cult and Other Philosophical Follies, Blackwell, 1991, p. 188 ; cité dans La demande philosophique, op. cit., p. 125.

[27]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 164 ; Wittgenstein, Remarques mêlées, Flammarion ‘GF’, p. 17/72.

[28]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 165.

[29]Wittgenstein, Fiches, Gallimard, 2008, § 455

[30]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 164-165.

[31]Ibid., p. 73-74.

[32]Ibid., p. 252.

[33]Ibid., p. 148.

[34]« La philosophie d’un antiphilosophe : Paul Valéry » [1993], Essais IV, Agone, 2004, p. 258.

[35]« Sur quelques conséquences indésirables du pragmatisme » [1992], Essais IV, Agone, 2004, p. 216.

[36]« La philosophie d’un antiphilosophe », Essai IV, op. cit., p. 253.

[37]« Le besoin de croyance et le besoin de vérité », Agone, 38, 2008, p. 299-300 (http://revueagone.revues.org/232, § 32).

[38]« La philosophie d’un antiphilosophe », Essai IV, op. cit., p. 250

[39]La demande philosophique, op. cit., p. 54.

[40]« Le problème de l’essai et de l’essayisme » [2001], La voix de l’âme et les chemins de l’esprit, op. cit., p. 390.

[41]Ibid., p. 389-390.

[42]Ibid., p. 375.

[43]Ibid., p. 374.

[44]Ibid., p. 409

[45]Ibid., p.  409.

[46]Ibid., p. 414.

[47]Musil, Gesammelte Werke, VII, p. 870.

[48]« Musil, la philosophie de la vie et les illusions de l’action parallèle » [1985], La voix de l’âme, op. cit., p. 197.

[49]« La science sourit dans barbe », La voix de l’âme, op. cit., p. 91.

[50]La demande philosophique, op. cit., p. 17.

[51]Wittgenstein, Remarques mêlées, Flammarion ‘GF’, p. 23/79.

[52]Le philosophe chez les autophages, op. cit., p. 137.

[53]« Les positivistes » [1980], Essais VI, Agone, 2011, p. 52.